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10 mars 2015

 

 

 

"Lettres d'amour", Lecture d'extraits du recueil de nouvelles de Antonio Tabucchi : "Il se fait tard, de plus en plus tard"

par Françoise LABRETTE et Marie Hélène VIVIANI

estradeFL & MHVC'est désormais une habitude, saluée par l'engouement des acorfiens, de voir la rencontre finale de la saison consacrée aux lectures en duo d'écrivains italiens, brillamment interprétées par Marie-Hélène Viviani et Françoise Labrette.
Avant de commencer Marie-Hélène nous lit un ravissant poème sur Venise écrit par une acorfienne, Béatrice Zanghellini, qui recueille un large hommage d'applaudissements des auditeurs agréablement surpris.
Puis elle présente le choix des textes; il s'agit de nouveau de Tabucchi, dont on quitte cette fois le registre poétique pour sonder les mystères de la nature humaine. Il s'agit de lettres écrites par des hommes, différents et semblables, lettres écrites à une femme aimée, mais disparue, ou lointaine, ou perdue...
Dix-sept lettres sans lien entre elles, d'époques variables, envoyées à des femmes qui ne se ressemblent pas, lettres toujours nouvelles, réunies par le même style et leur objet principal, qui est l'amour. Ce sont des textes brillants et souvent drôles, écrits souvent sur le ton de la conversation, et dont on apprécie la fantaisie, même si l'on peut les juger parfois excessifs, dans leur démonstration d'érudition ou leur recherche de virtuosité. Mais le style de Tabucchi est étincelant dans l'expression d'une pensée qui parait tourbillonner.
Sujet difficile à représenter, et il fallait faire une sélection parmi les 17 lettres : sans doute le choix fut bon, car les deux lettres choisies furent suivies avec ferveur par un public en pleine participation.
Cette fois il ne s'agissait plus seulement de conter, mais de représenter les sentiments, et d'aider à ressentir les images choisies par l'auteur. Cela réclamait de nos lectrices une interprétation proche de la scène, bien réussie non seulement par la variété des intonations, mais aussi par leurs gestes mesurés, ou l'expression nuancée imprimée à leurs visages. Fruit des répétitions, l'une et l'autre se suivaient dans la lecture en parfaite harmonie, permettant d'exprimer au mieux la pensée de l'auteur et l'intelligence de son écriture.
La première lettre, “je suis passé te voir, mais tu n'étais pas là” nous transporte sur un chemin de rêve, sans point fixe et sans bornes, et il nous semble avoir bien perçu cette image de suspension dans l'espace et le temps rendue par nos deux lectrices.
Pourtant la belle description, faite au début de la lettre, d'un merveilleux buffet campagnard, nous avait solidement attachés à une table dont on aurait souhaité ne jamais s'éloigner.
La deuxième lettre prend volontairement l'allure d'un conte, mais il ne faut pas s'y tromper, car il s'agit d'un conte animé par la passion et le désir. Nos conteuses s'amusent à nous promener du rêve à la réalité, dans les trouvailles de style et les visions de l'auteur, ses pensées intérieures, l'exclamation de ses désirs.
Il y a pourtant contraste entre cette atmosphère de conte et la désinvolture du style, et dans la rapide progression vers le rêve érotique terminant la lettre, le lien étant peut-être les vers de Whitman, lus en anglais avec talent par Mauricette Aussourd. En conclusion de sa brève lecture, Mauricette nous éclaire sur le poète américain Walt Whitman, très apprécié par Tabucchi, qui “voyait le sexe en “réceptacle des forces intérieures”.
Les nombreuses interventions des acorfiens à la fin de la lecture étaient bien la preuve de leur intérêt, avec des remarques variées qui ont paru souvent très judicieuses et montraient ainsi combien ce choix difficile des lettres devait être approuvé, certainement grâce à la qualité des lectures, saluée par des applaudissements répétés.


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