Année 2000-2001 : 3 avril 2001

Casanova II — L'écrivain touche à tout
par
André Lingois et Jean Paul Reynaud

Cette causerie à deux voix par André Lingois et Jean Paul Reynaud, a été donnée le 3 avril 2001, faisant suite à "Casanova I — Le personnage", donnée le 26/4/2000, qui illustrait sa vie aventureuse.

Il s’agissait en cette seconde occasion, de montrer l’étendue de ses activités variées qui vont de la tricherie aux jeux jusqu’à la direction d’une manufacture, de son œuvre d’écrivain polygraphe, et aussi du destin de celle-ci. S’il est vrai que Casanova a eu de son vivant un certain succès, il a dû attendre une pleine reconnaissance de son talent au XXème siècle, voire un titre de grand écrivain sous la plume de défenseur médiatique, comme Philippe Sollers ou Dominique Fernandez, ou d’universitaire comme Chantal Thomas.

En replaçant l’activité multiforme de Casanova dans le XVIIIème siècle bouillonnant, les intervenants en ont éclairé plusieurs aspects : le charlatan, le joueur, l’alchimiste, l’adepte des sciences occultes, le franc-maçon, avec ce mélange permanent de savoir authentique et de friponnerie.

L’œuvre de Giacomo Casanova a été étudiée en fonction de chacune des grandes périodes de sa vie : d’abord la jeunesse, principalement à Venise, jusqu’en 1756, date de son évasion rocambolesque de la prison des Plombs : son séjour, ou plutôt ses 5 séjours à Paris, où il fréquente tous les milieux, même celui des affaires ; puis ses nombreuses allées et venues dans toutes les grandes cours et les grandes villes d’Europe, qui feront de lui un voyageur cosmopolite aussi célèbre que le Prince de Ligne ; ensuite son retour de 1774 à 1783 à Venise, ou une fois rentré en grâce auprès du Tribunal des Inquisiteurs d’Etat, il mène de front une carrière littéraire et une carrière d’agent secret.

Le dernier acte de sa vie se déroule en Bohême, où Casanova a accepté la charge de bibliothécaire du chateau de Dux, résidence du Comte de Waldstein, neveu du Prince de Ligne. Cette période plutôt sombre correspond à une frénésie d’écriture : outre la rédaction des Mémoires — dont le titre exact est Histoire de ma Vie — Casanova fait paraître en 1788 un volumineux roman fantastique et d’anticipation : "Icosameron" (Les vingt jours) ou “L’histoire d’Édouard et d’Élizabeth qui passèrent 81 ans chez les Mégamicres, habitants aborigènes du Protocosme.”

L’accent a été mis sur la variété de la production littéraire de ce personnage que le grand public a pris pour un Don Juan de salon et dont le film de Fellni donne un portrait peu flatteur. Or Casanova peut être considéré comme le symbole de la curiosité encyclopédique du XVIIIème siècle européen, aussi éveillée que celle d’un Voltaire ou d’un Frédéric II de Prusse. Il a fait œuvre d’historien, de mathématicien, de libelliste, de traducteur. il a publié une revue théâtrale, il a écrit pour le théâtre. La traduction veut qu’il aurait collaboré — tant soit peu ! — au Don Giovanni de Mozart et de Da Ponte. On ne prête qu’aux riches...



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